Accéder au contenu principal

Picasso - le jeune homme et le cheval, 1907

Toujours à l'exposition "Matisse, Cézanne, Picasso... L'aventure des Stein" au Grand Palais à Paris, j'ai pu revoir ce tableau, Le jeune homme et le cheval, que Picasso a peint en 1907 durant sa période rose. Le portrait du jeune homme et de son cheval, modèles d'un cirque espagnol, est remarquable par la fine analyse psychologique qu'il propose. On est avant tout impressionné par la franchise de la position du garçon et de l'animal, qui se tiennent sur le devant de la scène sans aucun élément ou objet qui viendrait perturber la concentration du visiteur. L’arrière-plan est pâle, formé de l'ocre du sol qui vient presque se confondre avec le gris du ciel, permettant l'intégration parfaite des deux figures par un subtile écho de couleurs : le garçon dialoguant avec la terre, et le cheval avec le ciel. C'est un trait caractéristique de la peinture de Picasso à cette période (ainsi que dans la période bleu qui la précède) que de faire fusionner les figures et le fond à travers la couleur.

Le jeune homme semble tenir le cheval par une bride. Ainsi conditionné par les images gravées dans notre mémoire, nous ne remarquons pas immédiatement que la bride n'est pas là. On interprète généralement ce geste comme une image du jeune garçon domptant sa propre jeunesse. Mais je pense aussi à une scène que l'on peut voir assez facilement dans les cirques: le tour de l'arène par les cavaliers et leurs chevaux à la fin de leur numéro. Ce regard perdu dans le vide est en effet celui de ces acrobates qui effectuent chaque jour, de manière quasi mécanique, le même numéro. Il est peut-être perdu dans ses pensées ou tout simplement ennuyé par cet acte répété ad nauseam. Le cheval quant à lui paraît bien apprivoisé, le pas élégant et contrôlé, mais il n'est pas absent : un léger mouvement de son cou révèle une étincelle de vie, une dynamique, qui contraste avec l'attitude pensive et un peu résignée du garçon.

Par la simplification des couleurs et du dessin,  il n'y a pas de profondeur dans le tableau. Tout semble aplati. Notre regard est d'abord attiré par le visage du jeune homme pour après être redirigé vers la tête du cheval, puis vers le corps nu du garçon. Une représentation du corps qui s’inspire clairement de certain dessins de Cézanne également exposés au Grand Palais. Le tout est à l'origine d'une image puissante, simple et complexe à la fois, qui force l'admiration.

(Le tableau est normalement exposé au Museum for Modern Art - MOMA).

Commentaires

  1. ... toute projection gardée, je me demande si le jeune homme conduit le cheval ou si c'est l'inverse.
    Au demeurant, s'agit d'une métaphore de ma propre existence.

    RépondreSupprimer
  2. Mon existence :
    Est-ce le j.h. qui conduit le cheval ou le cheval qui conduit le j.h.?

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

Palais Royal: les colonnes de Buren et la fontaine Sphérades

En entrant dans Cour d'honneur du Palais Royal, vous vous trouvez immédiatement au milieu de multiples colonnes noires et blanches de toute taille, émergeant du sol comme des arbres qui poussent. Lorsqu’on se penche par-dessus les deux puits qui se trouvent dans la cour, on s’aperçoit que les colonnes se prolongent en sous-sol. Elles déterminent donc deux niveaux, d’où le titre de cette œuvre in situ : Les deux plateaux . En 1986, sous la présidence de François Mitterrand , le Ministère de la culture et de la communication, logé dans la galerie des proues du Palais Royal, commande une sculpture pour la cour intérieure à l’artiste Daniel Buren . Cette œuvre sculpturale s’inscrit dans le cadre des grands projets de François Mitterrand, qui, dans les années 1980, souhaite transformer la ville musée en ville moderne en y introduisant l’art et l’architecture contemporains. Buren est membre fondateur du groupe BMPT (Buren, Mosset, Parmentier et Toroni), qui, dans l’esprit des années 19

Balade dans le Paris médiéval - Rive droite

Avec ses 200.000 habitants au début du XIVe siècle, Paris était au Moyen Âge l'une des plus grandes villes de l'Occident. La capitale connut de ce fait un essor urbanistique et architectural important. Pourtant, peu de vestiges de cette époque sont visibles aujourd'hui. Avec la stabilisation du pouvoir royal à Paris au XVIe siècle, la ville devient l'objet d'une intense activité de construction de demeures seigneuriales, bourgeoises voir religieuses.    C'est au Moyen-Âge que de nouvelles règles urbanistiques sont établies : aux quartiers carrés et structurés qui dérivaient du plan des campements militaires romains, se succède une organisation spécifique dans laquelle l'habitat se développe autour des lieux importants (châteaux, églises, monastères, mais aussi ponts ou fleuves). Des enceintes murales délimitent par ailleurs ces nouveaux modèles de construction afin notamment de protéger les habitants des incursions de troupes hostiles. Paris se dévelop

Le Palais-Royal, havre de la séduction à Paris

Le Palais-Royal était un haut lieu de culture (théâtres, opéra, libraires), fréquenté par le beau monde et les grands philosophes (Diderot, Rousseau, etc.). Des événement importants y eurent lieu, notamment l'émeute du 10 juillet 1889 qui précéda la prise de la Bastille. Quelques années plus tard, Napoléon y rencontra sa future épouse Marie Josèphe Rose Tascher de La Pagerie, dite Joséphine de Beauharnais, alors amante de Paul Barràs. Mais les lieux inspiraient aussi d'autres affairements un peu moins avouables: au XVIIIe siècle et au tournant du XIXe siècle le Palais-Royal était la citadelle de la vie nocturne et de la débauche parisienne. Le guide complet du Palais-Royal publié par Blue Lion Guides est disponible gratuitement ici . Au XVIII et XIX siècle, en passant par la Révolution, le Palais Royal était le haut-lieu de la galanterie parisienne. D'abord sous l'Ancien Régime, les activités étaient hors la porté de la police car le Palais était un domaine royal