Nous avons récemment finalisé notre premier guide sur le Palais Royal avec Ulrike Kasper, dont voici un avant-goût :
Le
Palais Royal est à l’image même de Paris, car il unit l’histoire politique et
culturelle avec la réalité contemporaine. Peu d’endroits à Paris affichent une
telle concentration d’événements historiques. Sur les façades, les décorations
et les sculptures du Palais Royal on découvre différentes couches de l’histoire de France, allant du 17e au 20e siècle.
Le Cardinal Richelieu par Philippe de Champaigne |
Le
Palais est d’abord un centre de pouvoir: il se présente d’ailleurs comme
la continuité naturelle du palais du Louvre, résidence des Rois de France du
XIV au XVI siècle, qui se trouve juste en face du Palais Royal, côté rue de
Rivoli. Sa proximité physique témoigne du désir du Cardinal Richelieu d’être logé au plus proche du roi Louis XIII pour ainsi faire jouer son pouvoir. A sa mort, Richelieu fait don de
sa demeure au roi Louis XIII. Le « Palais Cardinal » devient alors « Palais Royal » et peu de temps après, en 1661, Louis XIV le lègue à son frère Philippe de France, duc d'Orléans. Depuis lors et jusqu’en 1848, l’histoire du
Palais Royal est fortement liée à celle de la lignée des Ducs d’Orléans qui y demeurent presque sans interruption. C’est au
XIX siècle d’ailleurs que les Orléans accèdent au pouvoir avec Louis Philippe, qui s’installe brièvement au Palais Royal avant de se fixer aux
Tuileries.
Mme de Rambouillet |
Le
Palais devient un centre de culture. En France comme ailleurs, le pouvoir et la
culture s’attirent mutuellement. Avant même que Richelieu construise son palais, l’Hôtel de Rambouillet abritait déjà un des premiers
« salons » littéraires parisiens. Le salon, tenu par Catherine de Vivonne, Marquise de Rambouillet, était fréquenté par de nombreux artistes et personnages
illustres: entre autres les écrivains François de Malherbe , Corneille,
Racan et Madeleine de Scudéry. Même le Cardinal Richelieu, dont le palais devait par la
suite englober partiellement l’Hôtel de Rambouillet, fréquente celui-ci. Richelieu
renforcera la vocation culturelle du Palais Cardinal
en y agençant deux salles de théâtre où seront notamment jouées des pièces dont il est
l’auteur. Par la suite, les Ducs d’Orléans poursuivront la tradition théâtrale,
musicale et artistique du Palais qui en y installant le siège de trois académies
royales (peinture, architecture et musique). La tradition continue jusqu’à nos jours
avec l’établissement du siège du Ministère de la Culture (aujourd’hui Ministère
de la Culture et de la Communication).
Le
Palais fut aussi un lieu de volupté, pour ne pas dire débauche: cette douteuse renommée
remonte déjà à l’époque du premier duc d’Orléans, connu pour son inclination homosexuelle,
qui installa au Palais son amant de trente ans, le Chevalier de Lorraine. Avec
Philippe d’Orléans, devenu Régent à la mort de Louis XIV, le Palais
devient le lieu privilégié des festins libertins du Duc. A la fin du siècle le
Palais accueille dans ses appartements loués par Philippe Egalité des prostituées qui y trouvent refuge avec leurs clients
loin des yeux indiscrets et des griffes de la police qui ne peut pas pénétrer
dans l’enceinte du Palais Royal.
L’essayiste
Louis-Sébastien Mercier,
qui a vécu à la fin du 18ème siècle, écrit dans son œuvre
« Tableau de Paris » à propos du Palais Royal : « On
l’appelle ‘la capitale de Paris’. Tout s’y trouve […] Ce séjour enchanté est
une petite ville luxueuse, renfermée dans une grande ; c’est le temple de
la volupté, d’où les vices brillants ont banni jusqu’au fantôme de la
pudeur : il n’y a pas de guinguette dans le monde plus luxueusement
dépravée ; on y rit et c’est l’innocence qui rougit encore. »
Le
pouvoir, la culture et la volupté sont donc les trois caractères fondamentaux
du Palais Royal.
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Tous droits reservés. Texte de Ulrike Kasper,
Images: Wikimedia, Antonio Ca' Zorzi.
Images: Wikimedia, Antonio Ca' Zorzi.
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